Bien le bonjour à toutes et tous, comment vous portez vous ? Soyez les bienvenu(e)s dans ce nouveau carnet de voyage, dédié à mes premiers jours dans la capitale nippone.
Eh oui, après des mois de pérégrinations dans les différentes préfectures du Japon et m’être immergé à 100% dans la vie rurale, il est temps pour moi de renouer avec la Grande Ville que j’avais boudée jusque-là.
Je vous propose ainsi de laisser de côté pour le moment les rizières, légumes, veaux, vaches, cochons, couvées,… et de prendre pied dans l’aire urbaine la plus peuplée au monde.
Bienvenue à Tokyo !
Mon quartier de résidence pour les prochaines semaines
Grande première dans mon voyage : je pose mes valises pour deux mois, dans la capitale qui-plus-est. C’est vrai que jusqu’à maintenant, j’étais resté 4 semaines maximum dans mes lieux de volontariat. Ce mode de vie nomade m’a permis de découvrir des milliers de choses et d’en prendre plein les yeux. Mais il a également un prix : les déplacements à répétition, les rencontres aussitôt suivies des séparations, la nouveauté constante… tout cela finit aussi par être éreintant et commençait presque à émousser mon enthousiasme !
Je ressens donc un vrai soulagement à ralentir le rythme du voyage, et je profite de Tokyo de manière plus lente.
Par ailleurs, en arrivant à Tokyo, j’ai vite été confronté à une problématique pratique. Les transports en commun, bien qu’exemplaires en termes de fiabilité, sont chers. Ils sont aussi souvent pleins à craquer. J’ai donc décidé d’investir dans un autre moyen de locomotion pour découvrir Tokyo de manière plus libre et plus sereine. Je vous présente Adriano, mon meilleur ami pour les deux mois à venir.


Ironie du sort, mon lieu de résidence se nomme Nomad. Il s’agit d’une share-house, autrement dit un logement partagé entre plusieurs locataires. À la différence des auberges de jeunesse, les résidents sont plutôt ici pour des durées plus longues. Ce qui n’est pas pour me déplaire.
En ce qui me concerne, le deal est le suivant : en échange de 3h de ménage 4 fois pas semaine, je peux profiter d’une chambre gratuitement. Un arrangement bien pratique pour économiser dans la ville la plus chère du pays !

Autre avantage, la localisation de la share-house est excellente. Nichée dans une rue d’un quartier résidentiel charmant, je peux profiter d’un calme surprenant. Une vraie aubaine pour s’isoler de l’agitation constante de cette gigantesque métropole.








Malgré cette situation, en 10 minutes de marche, et la traversée de la rivière Sumida, me voilà directement dans le quartier d’Asakusa ! Ce quartier, point de passage incontournable des touristes, est célèbre pour le magnifique complexe de temples Sensō-ji. Pris d’assaut la journée, j’ai cependant adoré le visiter la nuit au calme, pour profiter de son ambiance majestueuse.






La rue Kappabashi-dori s’allonge à deux pas du temple. Très célèbre elle aussi, elle aligne uniquement des boutiques dédiées à l’univers de la cuisine. Les professionnels de la restauration comme les badauds désireux de ramener un souvenir typique du Japon (céramiques, bols, baguettes, théière, verres, etc.) la fréquentent.
Personnellement, j’ai bien l’intention de remplir ma valise d’ustensiles de cuisine locaux, car les japonais ont su selon moi trouver un bon équilibre entre outils manuels traditionnels et mécanismes plus modernes.
C’est également dans cette rue que se trouvent les boutiques de faux aliments en cire. Ces représentations impérissables et très réalistes sont cependant bien plus chères que les originaux qu’elles imitent !








Vous aurez remarqué la créature verdâtre cachée dans un bol à soupe, qui veille sur les passants à l’entrée de la rue. Il s’agit d’un magnifique spécimen de Kappa, qui donne ainsi son nom aux lieux.
Déroule pour en savoir plus sur le Kappa, l’esprit farceur des rivières japonaises
Le kappa (河童, littéralement « enfant de la rivière ») est une créature légendaire (yōkai) du folklore japonais. Semi-aquatique, il ressemble à un croisement étrange entre une tortue, une grenouille et un petit garçon au teint verdâtre. Il est tantôt représenté de façon mignonne, tantôt terrifiante. Pour le reconnaître, c’est facile. Une cavité remplie d’eau, bordée d’algues, trône au sommet de son crâne. C’est elle qui lui confère sa force. Si cette eau se renverse… le kappa perd tous ses pouvoirs !
Il habite les rivières, les étangs et les zones humides. Le kappa est connu pour ses farces cruelles. Il tenterait de noyer les imprudents, ou de voler les concombres (son met préféré !)
Mais attention : le kappa n’est pas toujours malfaisant. Il est aussi réputé pour être lié par un sens de l’honneur très fort. Si vous vous inclinez poliment devant lui, il s’inclinera aussi… et fera tomber l’eau de sa tête, devenant inoffensif. Certains récits racontent même que les kappa ont sauvé des humains ou aidé des villageois en échange de leur gratitude.
On trouve aujourd’hui des statues de kappa un peu partout au Japon, notamment à Kappabashi-dori, à Asakusa — d’où son nom !

Depuis l’auberge, en partant dans la direction opposée, on arrive en quelques minutes au pied de la Tokyo Skytree. Haute de 610 mètres, elle représentait lors de son inauguration en 2012, le 2ème plus haut bâtiment autoportant du monde. De fait, elle offre un point de vue unique sur la mégalopole, pourvu que son sommet ne soit pas avalé par les nuages…


Enfin, autre lieu remarquable situé non loin de mon quartier, le siège social de la marque de bière Asahi, attire les regards. C’est le célèbre architecte Phillipe Stark qui est à l’origine de la sculpture qui recouvre son toit. Sensée représenter une bulle de bière, ainsi que « le cœur brûlant de la bière Asahi », les Tokyoïtes préfèrent la désigner comme la grande crotte dorée d’Asakusa. Je vous laisse juger…

D’ailleurs voici un petit tip pour profiter d’une vue sur Tokyo sans la foule ni le prix de la Skytree. Le siège social d’Asahi dispose d’un bar au 22e étage. Pour le prix (un peu gonflé, sans surprise) d’une bière, vous profiterez d’un moment suspendu au-dessus de la ville.


Plongée en plein cœur d’un festival de mafieux
Lors de mes premiers jours à Tokyo, se tenait un festival très spécial. En effet, par le fruit d’un heureux hasard, je suis arrivé en même temps que se tenait le mythique Sanja Matsuri. Il s’agit d’un des trois plus grands festivals de Tokyo. Il prend place à Asakusa, à deux pas de chez moi.
Le Sanja Matsuri est un festival profondément ancré dans les traditions shintoïstes. Il se déroule chaque année au mois de mai, durant le troisième week-end, pour rendre hommage aux trois fondateurs du temple Sensō-ji à Asakusa.
Pendant trois jours, le quartier se transforme alors en une marée humaine joyeuse, bruyante et exaltée.


Le cœur de l’événement est sans nul doute le transport des 3 grands mikoshi. Ce sont des sanctuaires portatifs richement décorés, portés à bout de bras par des groupes d’hommes et de femmes survoltés.
Au-delà d’une simple promenade, ces mikoshis sont secoués, pivotés, balancés, presque cognés parfois. Le tout rythmé par les tambours taiko, les cris de ralliement et les encouragements des spectateurs. Croyez-moi, ça remue !





L’une des particularités de ce festival, et ce qui fait en partie sa renommée, c’est qu’il s’agit d’un des rares moments de l’année où les yakuzas sortent de l’ombre pour parader à visage découvert. Ils exhibent à la vue du public leurs impressionnants tatouages « Irezumi », véritables œuvres d’art vivantes.

Les yakuzas, des mafieux pas comme les autres
Contrairement à l’image des gangsters tapis dans l’ombre, les yakuzas ont longtemps occupé une place à part dans la société japonaise. Formés à l’époque d’Edo, ce groupe se veut héritier d’un « code d’honneur » inspiré des samouraïs, bien qu’ils soient souvent impliqués dans des activités criminelles : jeux, extorsions, trafics divers…
Ils ont cependant un rôle parfois positif dans la société : basses besognes que la police ne peut ou ne veut pas effectuer, protection, mais aussi parfois aide humanitaire en cas de catastrophe naturelle.
Leur signe distinctif sont les irezumi, ces tatouages traditionnels couvrant tout le corps, réalisés à la main selon une technique très douloureuse. En dehors de rares événements comme le Sanja Matsuri, ces tatouages restent cachés, car ils sont encore fortement associés à la criminalité. Ainsi les bains publics, les salles de sport ou les plages japonaises affichent souvent des panneaux « interdit aux personnes tatouées ».
Aujourd’hui, leur influence a fortement décliné, et la loi japonaise restreint de plus en plus leurs activités. Mais dans certains festivals traditionnels comme celui d’Asakusa, ils apparaissent encore en pleine lumière. Leur présence fascinante rappelle que le Japon n’est pas aussi lisse qu’il n’y paraît.
La saison des pluies et des fleurs
Quelle image avez-vous de l’été japonais ? En comparaison à la France, où nos étés sont le plus souvent synonymes de soleil et de chaleur, le japon voit les choses légèrement différemment.
Après un mois de Mai sous le signe de la verdure, le mois de Juin correspond à la saison des pluies au Japon, appelée Tsuyu. Il s’agit souvent de pluies assez légères, mais très fréquentes, qui donnent à la ville un aspect singulier. Cette saison est associée à une forte augmentation de l’humidité, mais aussi de la chaleur !
Les japonais font alors tomber la veste, sortent leurs parapluies translucides, et vaquent à leurs occupations, en essayant de conserver ces derniers le plus longtemps possible. En effet, malgré une sécurité de renommée mondiale, il s’agit de l’objet le plus volé dans le pays !
Cependant, la pluie n’est pas forcément une ennemie, et à titre personnel, je trouve qu’elle apporte souvent un côté très esthétique à Tokyo. Dans les rues, mais aussi dans les espaces verts, car en effet, le mois de Juin est aussi une très belle période pour les fleurs.
Les premières à pointer le bout de ses pétales sont les hortensias. Très appréciés des japonais, on les retrouve à tous les coins de rues, mais aussi en grand nombre dans les parcs de la capitale. Ils forment alors de magnifiques taches colorées, sublimées par temps pluvieux, comme ici au parc de la rivière Sumida.










Peu de temps après, c’est au tour des Iris de fleurir. Ces derniers sont souvent retrouvés dans les parcs où ils sont plantés en zones resserrées. Les japonais viennent alors profiter de leur élégance comme ici dans le parc Hokiri kouen, au Nord Est de Tokyo, ou dans le parc de la rivère Arakawa.






La pluie est également un temps propice aux activités à l’intérieur. Vous connaissez ma passion pour la gastronomie japonaise ! Je profite donc des gouttes pour me réfugier dans des lieux tous plus délicieux les uns que les autres, en particulier les restaurants de ramens. Boire un bon bouillon chaud et slurper ses nouilles quand il fait moche dehors, c’est une expérience à part…








Premier bilan
Tokyo est une ville fascinante, grouillante de monde et d’agitation, mais aussi pleine de surprises. Chaque incursion dans un nouveau quartier me révèle de nouvelles choses. Au final, on a presque l’impression qu’il s’agit de plusieurs villes en une.
Cette arrivée à Tokyo marque également un tournant dans mon voyage. C’est l’occasion pour moi de reprendre mon souffle, et de porter mon regard sur la fin du périple. Même si je n’ai pas envie que ça s’arrête, il faut voir les choses en face et réaliser que cela fait près de 8 mois que je suis parti…
Je réalise ainsi que ma volonté de visiter le maximum de préfecture de fond en comble s’est un peu effritée. Par conséquent, je suis heureux de ralentir un peu le rythme et de profiter des recoins de Tokyo pour un temps plus long. Pour ce qui est de la suite du voyage au Japon… on verra ! 🙂
J’ai hâte de vous partager mes prochaines aventures dans la capitale. D’ici là, portez vous bien, et prenez garde à la canicule !
またね
Antoine